Skip to content Skip to sidebar Skip to footer

Un organe constitutionnel sous examen

Le Conseil consultatif des personnes vivant avec handicap, créé par la Constitution de 2015, devrait servir de trait d’union entre citoyennes concernées et autorités. Or, son bureau est resté discret, reconnaît Jean Castard Nzaou Pambou, membre sortant, rappelant que « l’institution ressemble à un moteur en veille ».

Cette inertie prive les Congolaises handicapées d’un interlocuteur stable pour faire valoir des besoins spécifiques : accessibilité des centres de santé, adaptation des programmes de protection sociale, renforcement des parcours scolaires. Dans les départements ruraux, l’absence de relais institutionnel se traduit par une invisibilité quasi totale.

Les organisations féminines demandent donc une redynamisation basée sur un calendrier d’audiences publiques, un suivi budgétaire transparent et une représentation paritaire au sein du futur bureau. « Réactiver le Conseil, c’est reconnaître la citoyenneté pleine et entière des femmes handicapées », résume la sociologue Agnès Olinga.

Voix féminines et attentes sociales

Selon l’Union des informaticiens handicapés du Congo, près de 52 % des adhérentes vivent avec un handicap acquis après vingt ans, souvent à la suite de complications obstétricales. Le manque de structures de rééducation adaptées pénalise leur retour à l’emploi et accentue leur dépendance économique.

La juriste Mireille Mavoungou souligne que l’inclusion passe aussi par un changement de regard : « Beaucoup de Congolaises handicapées se retrouvent cantonnées aux activités informelles. La loi sur la promotion des petites et moyennes entreprises gagnerait à réserver un quota d’achats publics à ces entrepreneures ».

De Brazzaville à Pointe-Noire, des ateliers de sensibilisation sont en cours pour valoriser les parcours de femmes innovatrices malgré le handicap. Les chercheuses notent cependant qu’une mise à jour des données nationales est indispensable afin de formuler des politiques publiques basées sur des indicateurs fiables.

Le défi diplomatique du visa américain

L’annonce, en juin, de la restriction de délivrance de visas américains à certains ressortissants congolais a suscité l’inquiétude des étudiantes en mobilité internationale. Pour Jean Castard Nzaou Pambou, « il s’agit d’un malentendu appelé à se résoudre dans le respect des canaux diplomatiques ».

Les ministères concernés rappellent que des programmes d’échange sur le leadership féminin et le handicap sont financés par l’ambassade des États-Unis. La suspension partielle pourrait compromettre ces bourses si elle devait durer. Les associations plaident donc pour un dialogue soutenu, afin de préserver ces passerelles de compétences.

En attendant, des partenariats Sud-Sud se renforcent : l’Université Marien-Ngouabi accueille cette année un séminaire coanimé avec le Sénégal sur les technologies d’assistance. Les organisatrices y voient la preuve qu’une stratégie d’ouverture diversifiée peut sécuriser la formation continue des Congolaises handicapées.

Calendrier électoral et participation inclusive

Le mandat présidentiel en cours se terminera en mars 2026, et le corps électoral sera convoqué l’an prochain pour les opérations préliminaires. Les organisations de femmes handicapées encouragent leurs membres à vérifier leur inscription, rappelant que les bureaux de vote disposent désormais de gabarits en braille et de rampes d’accès mobiles.

Cette mobilisation citoyenne répond à l’article 4 de la Charte africaine de la démocratie qui consacre le droit de tous à participer à la gestion publique. « L’inclusivité commence par le vote », martèle l’ONG Femmes Debout qui a formé cent observatrices handicapées lors des locales de 2022.

Les spécialistes de la participation politique insistent toutefois sur la nécessité de campagnes d’information en langues locales, afin de toucher les électrices sourdes ou malvoyantes des zones enclavées. Le Conseil consultatif réformé pourrait y jouer un rôle de coordination décisif.

Perspectives pour une gouvernance sensible au genre

La relance du Conseil suppose une articulation étroite avec le Programme national de développement 2022-2026, qui fait de l’autonomisation économique des femmes un levier de croissance. Intégrer des indicateurs handicap dans les tableaux de suivi permettrait d’éviter que les priorités de genre n’ignorent cette dimension.

Des experts recommandent l’instauration d’un fonds d’innovation dédié aux technologies inclusives, tel que les claviers braille à bas coût ou les applications de télésanté. Financé par des partenariats public-privé, ce mécanisme pourrait accélérer l’employabilité des Congolaises handicapées dans les services numériques.

Enfin, le renforcement des compétences de leadership reste central. « L’expérience d’exercice de l’autorité publique m’a montré qu’une voix formée est une voix écoutée », souligne Jean Castard Nzaou Pambou. Les observatrices estiment qu’un Conseil redynamisé offrira justement cet espace de formation et de plaidoyer continu.