Session inaugurale des anciens de Radio Congo
Le 1er août 2025, au Centre interdiocésain des œuvres de Brazzaville, les voix historiques qui ont jadis rythmé les ondes nationales se sont rassemblées. Guidés par Michel Rudel Ngandziami, elles ont tenu la session inaugurale de l’Amicale des anciens journalistes de Radio Congo, témoignant d’une vitalité retrouvée.
Créée trois mois plus tôt, l’association veut éviter l’écueil des initiatives éphémères. «Notre organisation ne sera pas un mort-né», avertit son président, qui plaide pour «une feuille de route canalise nos efforts à court et moyen terme» (Michel Rudel Ngandziami, 2025). Le ton de la relance est donné.
Un plan d’action solidaire en trois piliers
Le plan d’action, adopté à l’unanimité, repose sur trois piliers. D’abord, une assistance sociale destinée aux membres vieillissants. Ensuite, des programmes de formation continue pour entretenir l’exigence professionnelle. Enfin, la promotion de la culture et des loisirs, afin d’entretenir un esprit de corps propice à la transmission.
Au-delà de l’organigramme, l’événement révèle une tendance marquante du tissu associatif congolais : la montée des dispositifs d’entraide face aux mutations socioéconomiques. Dans un pays où la protection sociale demeure perfectible, ces réseaux informels complètent l’action publique en offrant des filets de sécurité adaptés à chaque parcours.
Mémoire, numérique et transmission intergénérationnelle
Les fondateurs, dont plusieurs femmes figures de l’antenne d’hier, insistent sur la mémoire collective. «Nous voulons sauvegarder le patrimoine sonore du pays tout en restant utiles aux générations connectées», explique la journaliste retraitée Thérèse Massouami (2025). La numérisation des archives devient ainsi un axe prioritaire du groupe.
Pour les sociologues, cette dynamique relève d’un capital social «bonding», c’est-à-dire un lien serré entre pairs dont le passé professionnel commun constitue la matrice. Elle s’avère complémentaire du capital «bridging», plus ouvert, que l’Amicale souhaite tisser avec les jeunes reporters encore actifs au sein de la radio publique.
Recherche de ressources et partenariat institutionnel
La feuille de route prévoit également un plaidoyer discret auprès des autorités pour obtenir un siège administratif adapté. Sans formuler de revendications politiques, l’association souligne que disposer d’un lieu pérenne favoriserait les ateliers, accueillerait une médiathèque et permettrait aux membres à mobilité réduite d’accéder facilement aux services.
La question du financement reste sensible. Les cotisations statutaires fournissent un socle, mais elles devront être complétées par des partenariats privés. D’après Serge Michel Odzocki, sénateur et ancien directeur général de Radio Congo, «l’avenir de la structure repose sur notre capacité collective à générer des ressources endogènes» (2025).
À travers ce propos, l’ancien ministre esquisse un modèle fondé sur la responsabilité individuelle et la mutualisation. Cette logique correspond aux orientations gouvernementales prônant l’autonomisation des organisations de la société civile, tout en s’inscrivant dans la dynamique nationale de soutien à l’économie sociale et solidaire.
Place des femmes et mentorat professionnel
Sur le plan symbolique, l’initiative réhabilite la figure du journaliste retraité, souvent minoré dans les représentations collectives. Les membres rappellent que la défense de l’éthique médiatique suppose de continuer à former, conseiller et épauler les jeunes, particulièrement les femmes confrontées à des obstacles spécifiques dans le milieu des médias.
Selon l’Observatoire national congolais des violences faites aux femmes, seules 32 % des journalistes radio en activité sont des femmes, et elles occupent rarement des postes de direction. L’Amicale pourrait donc devenir un lieu de mentorat informel, capable de favoriser l’accès des professionnelles aux responsabilités éditoriales majeures.
Le projet d’anniversaire prévu en 2026 constitue une opportunité stratégique. En célébrant l’an I, l’association envisage une exposition itinérante retraçant l’évolution de la station, depuis les journaux parlés d’après-guerre jusqu’aux formats numériques. Cette rétrospective permettra de valoriser les pionnières et d’illustrer la longue marche vers la parité.
Communication, innovation sociale et gouvernance
Pour renforcer sa visibilité, le collectif mise sur les réseaux sociaux et la radio elle-même. Une émission mensuelle, animée en alternance par des membres féminins et masculins, est en cours de conception. Elle offrira une tribune à la fois historique et prospective, traitant d’éthique, de formation continue et de solidarité.
Les analystes estiment que cette démarche s’insère dans une tendance mondiale où les associations d’anciens employés deviennent des laboratoires d’innovation sociale. En capitalisant sur l’expertise accumulée, elles proposent des réponses flexibles aux défis de l’heure : vieillissement, précarité des indépendants, transition numérique et exigences de responsabilité sociétale.
Dans cette perspective, l’Amicale souligne que sa gouvernance restera inclusive. Un comité éthique mixte validera chaque action, tandis qu’un rapport d’activités annuel sera rendu public. Cette transparence, explique Michel Rudel Ngandziami, vise à «garantir la confiance des partenaires et à pérenniser notre légitimité auprès du public».
Une promesse collective porteuse d’avenir
À l’issue de la session, les participants ont quitté le Centre interdiocésain sous une pluie tropicale battante, mais porteurs d’un même engagement : «Soyons utiles pour les autres, soyons utiles pour nous-mêmes». La promesse résonne comme un manifeste, rappelant que la radio, hier média fédérateur, peut encore rassembler.
Le succès de la démarche sera mesuré lors du premier bilan trimestriel, prévu en décembre 2025, moment décisif pour consolider l’élan.