Partenariat stratégique Figa-Odel
Sous les voûtes modernes de l’auditorium du Port autonome de Pointe-Noire, le 22 août, un simple paraphe a scellé un virage que les acteurs économiques locaux attendaient. En unissant leurs mandats, le Figa et l’Odel entendent fluidifier l’accès au crédit et renforcer la confiance entre banques et microfinances.
Leur convention s’inscrit pleinement dans l’architecture du Plan national de développement 2022-2026, dont l’axe deux recommande une mobilisation combinée des fonds publics et privés pour dynamiser des milliers de petites et moyennes entreprises congolaises, souvent confrontées à un déficit structurel de garanties.
Cette ligne de garantie de cinq milliards de francs CFA, placée sous le contrôle du trésor public, permettra à soixante-quinze entreprises membres de l’Odel de contractualiser un crédit sans hypothèque excessive et d’allouer rapidement le capital nécessaire à l’innovation locale.
Pour Dayi Allaire Branham Kintombo, directeur général du Figa, le cœur du dispositif n’est pas le prêt direct mais la construction d’un écosystème de confiance, condition sine qua non pour que les banques se réengagent durablement auprès des artisans et des nouvelles dirigeantes.
Son homologue, Ebeh Deschagrains, voit dans la convention « la consécration d’un travail de six mois » et l’ouverture d’une trajectoire ambitieuse : atteindre mille entreprises membres et générer environ huit mille emplois dans les cinq prochaines années.
Kolisa, accélérateur de microfinances
Le crédit Kolisa, présenté durant la cinquième édition du Forum horizon initiative et créativité, illustre concrètement la mécanique enclenchée par le partenariat.
Initialement prévu pour deux cent cinquante entrepreneurs, le programme a doublé son enveloppe sur instruction du Premier ministre Anatole Collinet Makosso, signe d’un soutien politique appuyé au développement du secteur informel et à l’émergence de micro-initiatives féminines.
Les 63,8 millions de francs CFA distribués toucheront cinq cents récipiendaires, actifs dans la restauration, la cosmétique, la vente en ligne ou l’habillement, avec des montants allant de cent mille à un million selon la robustesse financière du dossier.
Devant l’assemblée, la jeune Ricci El Louemba, commerçante de prêt-à-porter, a reconnu « un souffle nouveau pour faire avancer mon activité ». Son témoignage rejoint celui de Sarah Paka Zoulouka ou de Prince Jospin Sitou, tous porteurs d’une ambition inclusive.
Le modèle Kolisa repose sur un partenariat tripartite où l’État assure la dotation initiale, le Figa joue le rôle de garant et les institutions de microfinance effectuent le décaissement, ce qui réduit le coût du risque et accélère la livraison des fonds.
Entrepreneures et changement sociétal
Derrière les chiffres, c’est la dynamique sociologique qui retient l’attention des chercheurs en genre : près de 60 % des bénéficiaires Kolisa sont des femmes âgées de moins de 35 ans, souvent premières responsables économiques de leurs foyers.
L’économiste Senda Mouandza souligne que « l’autonomisation financière précède fréquemment l’autonomie sociale, y compris dans la prise de décision domestique ou communautaire », une affirmation corroborée par plusieurs enquêtes menées à Brazza et Pointe-Noire.
En mobilisant des montants certes modestes mais rapides, Kolisa sécurise la phase délicate de décollage des micro-entreprises féminines, souvent évincées des circuits bancaires traditionnels par absence de caution ou de titre foncier.
La sociologue Grâce Mapangou rappelle toutefois que « l’accès au financement n’est qu’une étape ; l’enjeu majeur reste l’accompagnement managérial, la formalisation juridique et la protection sociale des entrepreneures ».
Parallèlement, une plateforme numérique est en cours de développement pour permettre aux bénéficiaires de suivre l’évolution de leurs remboursements et de télécharger des modules de formation, garantissant ainsi une traçabilité indispensable à la crédibilité du programme aux yeux des partenaires techniques.
Perspectives territoriales et enjeux futurs
Dans la capitale économique, analystes et élus locaux voient déjà les premiers effets multiplicateurs : hausse de la demande de matières premières artisanales, redynamisation des circuits courts et création d’emplois non délocalisables.
Le directeur adjoint du Figa, Brice Makaya, a précisé que l’analyse rigoureuse des dossiers, suivie d’une contre-expertise sur le terrain, restera la norme pour préserver la viabilité du fonds et encourager une culture de remboursement responsable.
À moyen terme, le couple Figa-Odel envisage d’étendre l’initiative à d’autres départements, en impliquant les chambres consulaires et les collectivités, afin de créer un maillage national de garanties compatible avec l’intégration sous-régionale voulue par la CEMAC.
Pour les entrepreneures interrogées, la signature du 22 août représente surtout une invitation à la persévérance ; elle montre que, lorsque les institutions avancent de concert, l’énergie créative congolaise trouve enfin le levier financier à la hauteur de ses ambitions.
Observateurs et ONG locales estiment que le suivi attentif des indicateurs de genre, de gouvernance et d’impact territorial fera du duo Figa-Odel un laboratoire précieux pour d’autres initiatives de financement inclusif en Afrique centrale, à l’heure où l’économie exige résilience et solidarité.