Un atelier stratégique au cœur de Brazzaville
À l’abri de la moiteur de début de saison sèche, les locaux du Centre de documentation de l’Institut national de la jeunesse et des sports ont vibré, du 30 juin au 3 juillet 2025, au rythme d’un atelier d’envergure. Quarante cadres, venus des antennes de l’INJS et des services déconcentrés, se sont retrouvés autour d’un objectif précis : raffermir leurs compétences afin de mieux désamorcer la délinquance juvénile et endiguer les violences basées sur le genre. L’initiative, solidement appuyée par la représentation congolaise de l’Unesco, a bénéficié de l’appui institutionnel du Ministère de la jeunesse, des sports, de l’éducation civique, de la formation qualifiante et de l’emploi.
La cérémonie d’ouverture, présidée par Charles Makaya, directeur de cabinet du ministre, a donné le ton. Aux côtés du représentant-résident adjoint de l’Unesco, Brice Kamwa-Ndjatang, il a rappelé que « le capital humain reste la première richesse de la République », inscrivant ainsi la démarche dans la vision d’un développement durable placé sous le signe de la stabilité sociale.
Former pour prévenir la dérive délinquante
Les travaux ont d’abord interrogé les dynamiques contemporaines de la délinquance juvénile au Congo. Les formateurs ont mobilisé les apports de la sociologie interactionniste et de la psychologie communautaire pour éclairer les trajectoires à risque. Cartographie des zones urbaines sensibles, analyse des facteurs de vulnérabilité – chômage, décrochage scolaire, précarités familiales – et étude des micro-violences ont jalonné les échanges. La mise en commun d’expériences de terrain recueillies à Mfilou, Ouenzé et Dolisie a permis de dresser un tableau nuancé, loin des stéréotypes.
Brice Kamwa-Ndjatang a pointé l’urgence : « Le pays, à l’instar de nombreux autres, fait face à des défis préoccupants liés à la délinquance juvénile, aux violences sociales et aux violences basées sur le genre. Face à ces défis, le gouvernement a choisi de poser des actes concrets. » L’assertion a résonné comme un fil rouge tout au long de la session.
L’approche genre, un impératif transversal
Parce que la violence ne se décline pas de façon univoque, les équipes ont consacré un module complet à l’approche sensible au genre. L’enjeu consistait à doter les cadres de grilles de lecture capables d’appréhender la spécificité des violences que subissent les jeunes filles et les femmes. La clinique du traumatisme, la médiation socio-familiale et la construction de parcours de résilience ont été minutieusement passées au crible.
Les intervenants ont rappelé que la féminisation de la pauvreté reste un moteur silencieux de la vulnérabilité. Ils ont également insisté sur l’importance d’un langage inclusif et d’un positionnement éthique des encadreurs, pour prévenir les revictimisations. Les participantes ont salué la pertinence de séquences inspirées de la méthodologie du « care » et des standards internationaux de l’OIT, adaptés au contexte congolais.
Insertion, réinsertion et cohésion sociale
Le troisième axe a approfondi les stratégies de réinsertion centrées sur l’humain. Les animateurs y ont détaillé le rôle de l’Agence nationale d’insertion et de réinsertion sociale des jeunes, récemment dotée de centres pilotes tels que celui d’Aubeville dans la Bouenza. Orientation professionnelle, apprentissages qualifiants et accompagnement psycho-social y forment un triptyque destiné à détourner durablement les jeunes des spirales de violence.
Les cadres de l’INJS ont été initiés à la méthodologie de projet social intégratif. Cette démarche privilégie l’élaboration de parcours individualisés, articulés à un réseau d’acteurs multisectoriels – justice, éducation, santé, entrepreneuriat. Les exemples de partenariats réussis avec l’École nationale d’administration ou la Chambre de commerce ont illustré la valeur ajoutée d’une action interinstitutionnelle fluide.
Vers des politiques publiques ancrées dans le terrain
Au-delà du seul renforcement de capacités, l’atelier avait pour ambition de faire remonter du terrain des propositions opérationnelles. Les participants ont donc simulé la rédaction de notes stratégiques à destination du Conseil national de la jeunesse et du Comité interministériel chargé du suivi de l’Agenda 2030. Parmi les pistes retenues figurent la création de comités socio-éducatifs dans chaque antenne de l’INJS, l’évaluation trimestrielle des programmes de prévention et la consolidation d’un observatoire participatif des violences de genre.
La circulation systématique des données, gage de pilotage efficace, sera soutenue par un dispositif numérique interne. Celui-ci permettra un suivi longitudinal des bénéficiaires et une mesure en temps réel des indicateurs de réinsertion. Cette culture de l’évaluation devrait nourrir, à court terme, l’écriture de textes réglementaires portant sur la protection intégrale des jeunes.
Des perspectives éclairées pour la jeunesse congolaise
Le dernier jour, les voix des participants convergaient vers un constat optimiste. Le gouvernement, en choisissant d’investir dans le capital humain et la formation continue des cadres, consolide des leviers essentiels à la cohésion nationale. Les partenaires internationaux, à commencer par l’Unesco, voient dans cette dynamique une illustration concrète de l’Objectif 16 du développement durable, consacré à la promotion de sociétés pacifiques et inclusives.
À l’issue de l’atelier, un protocole de suivi a été signé. Il prévoit une session de remédiation semestrielle et la constitution d’une banque de bonnes pratiques accessible aux professionnels de tout le pays. Dans la perspective d’une jeunesse mieux protégée et insérée, l’INJS, fort de ces nouvelles compétences, s’impose désormais comme une courroie de transmission essentielle entre les ambitions nationales et les réalités du terrain.