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Journée internationale de l’alphabétisation 8 septembre

Le 8 septembre, la République du Congo rejoindra la communauté mondiale pour célébrer la Journée internationale de l’alphabétisation, instaurée par l’UNESCO. Au-delà d’une commémoration symbolique, la date vise à rappeler la place centrale de la lecture et de l’écriture dans la construction d’une société inclusive.

Le thème retenu, « Promouvoir l’alphabétisation à l’ère du numérique », met en évidence les transformations technologiques qui modifient l’accès à l’information. Il interroge la capacité des politiques publiques à conjuguer tradition livresque et outils connectés, notamment pour les groupes vulnérables comme les femmes rurales.

Selon l’UNESCO, plus de 750 millions d’adultes restent non alphabétisés dans le monde, dont près des deux tiers sont des femmes. Cette réalité confère une portée particulière à la célébration nationale, car la maîtrise des compétences de base agit comme un rempart contre les violences et la précarité.

Alphabétisation féminine et autonomisation

Au Congo-Brazzaville, l’alphabétisation apparaît comme un levier stratégique pour renforcer l’autonomie économique et civique des femmes. Maîtriser la lecture d’une fiche de paie, comprendre un contrat ou consulter un service en ligne conditionne l’accès aux revenus, aux droits juridiques et aux dispositifs de protection sociale.

La coordinatrice de l’Observatoire, Stéphanie Mabiala, souligne que « chaque certificat d’alphabétisation délivré à une femme réduit statistiquement la probabilité qu’elle subisse une violence économique ». Cet indicateur, dit-elle, incite les organisations de terrain à coupler cours du soir et ateliers de prévention.

Dans les quartiers périphériques de Brazzaville, des centres communautaires équipés de tablettes voient le jour. Financé par des partenariats public-privé, ce matériel permet d’initier les apprenantes à la saisie d’un texte, à la navigation sécurisée et aux démarches administratives en ligne sans surcharge budgétaire pour l’État.

Enjeux du numérique en milieu rural

L’extension du réseau 4G dans les départements du Nord a ouvert de nouvelles perspectives d’apprentissage. Toutefois, l’accès demeure inégal : d’après la Direction générale de l’économie numérique, moins de 40 % des ménages ruraux possèdent un smartphone, et la fracture de genre persiste.

Pour pallier ces écarts, certaines ONG locales expérimentent des radios interactives. Les leçons diffusées à horaires fixes sont accompagnées de numéros gratuits permettant aux auditrices de poser des questions via de simples appels manqués. Cette hybridation analogique-numérique montre que l’innovation peut rester adaptée aux réalités villageoises.

La sociologue Justine Ngakala rappelle que la transmission orale reste dominante dans plusieurs communautés. « Introduire un clavier tactile exige d’abord de valoriser les langues nationales avec des supports phonétiques fiables », explique-t-elle. D’où l’importance de la recherche sur les polices numériques compatibles avec le lingala ou le kituba.

Politiques publiques et partenariats stratégiques

Le ministère de l’Enseignement primaire, secondaire et de l’alphabétisation a révisé en 2023 son Plan d’action national. Parmi les priorités figurent la formation de 1 500 éducateurs, la production de manuels libres de droits et l’intégration d’un module de citoyenneté numérique aligné sur la stratégie gouvernementale Congo Digital.

Une convention signée avec la Banque de développement des États de l’Afrique centrale appuie la rénovation de dix centres d’alphabétisation pilotes. Les travaux incluent l’installation de panneaux solaires, garantissant un fonctionnement continu des équipements informatiques et une réduction des coûts énergétiques sur le long terme.

Sur le plan académique, l’Université Marien-Ngouabi développe actuellement une base de données d’indicateurs genrés. Cet outil permettra d’affiner le suivi-évaluation des programmes, avec des tableaux de bord accessibles aux décideurs et aux bailleurs. L’objectif affiché est d’orienter les financements vers les zones où les écarts sont les plus marqués.

Témoignages et dynamiques locales

À Madingou, Sylvie, 38 ans, a suivi six mois de cours accélérés. Elle peut aujourd’hui tenir la comptabilité de son atelier de couture sur un tableur simplifié. « Je n’imaginais pas utiliser un écran autre que la télévision », confie-t-elle, convaincue que l’alphabétisation l’a dotée d’une légitimité nouvelle.

Dans le district de Makoua, un programme inspiré de l’approche REFLECT combine réunions villageoises, cartes participatives et formation numérique. Le chef de projet, Arnaud Louemba, note une augmentation de 20 % de la participation féminine aux assemblées locales depuis l’introduction de supports visuels facilement partageables sur WhatsApp.

Cadre international et coopération

La célébration du 8 septembre s’inscrit dans la décennie des langues africaines proclamée par l’Union africaine. Elle répond aussi à l’Objectif 4 de l’Agenda 2030, qui vise une éducation de qualité inclusive et équitable. Les agences onusiennes encouragent la mutualisation des bonnes pratiques entre États de la sous-région.

Le Congo-Brazzaville, membre du Partenariat mondial pour l’éducation, participe déjà à la plateforme de partage de contenus ouverts. Il y propose des ressources bilingues français-lingala élaborées par des enseignants nationaux, renforçant ainsi la visibilité des savoirs locaux au sein de l’écosystème numérique continental.

Vers une société congolaise plus résiliente

En mettant l’alphabétisation au cœur des priorités, le Congo-Brazzaville consolide les bases d’une paix durable et d’une cohésion renforcée. L’accent placé sur le numérique n’exclut pas la dimension humaine : c’est l’interaction entre texte, écran et communauté qui permettra aux citoyennes de transformer leurs trajectoires individuelles et, demain, collectives.