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Un calendrier électoral sous tension

Prévu le 16 août 2025, le congrès électif de la Fédération congolaise de handball continue d’alimenter les conversations dans les gymnases de Brazzaville. À la veille du scrutin, une requête devant la Chambre de conciliation et d’arbitrage sème l’incertitude sur l’issue réelle du processus électoral.

Cette procédure d’extrême urgence, engagée par l’avocat Me Eric Ibouanga au nom du candidat disqualifié Avicenne Nzikou, vise à obtenir la suspension provisoire de l’Assemblée générale élective pour permettre un examen approfondi des griefs portant sur la composition de la Commission électorale indépendante actuelle.

Le Comité national olympique et sportif congolais, régulièrement mis à contribution dans les litiges fédéraux, a été assigné mais n’a pas comparu lors de l’audience de mise en état, le juge souhaitant respecter le principe du contradictoire avant toute décision susceptible de bouleverser le calendrier.

En apparence technique, le débat recouvre toutefois des enjeux sociétaux majeurs : l’accès des sportives aux instances dirigeantes et la sécurisation de leur parcours de performance, deux priorités que l’Observatoire national congolais des violences faites aux femmes suit de près depuis plusieurs saisons de championnat nationales.

Les enjeux pour la représentation féminine

Aujourd’hui, seules deux femmes siègent au comité exécutif sortant de la Fecohand, alors que la discipline compte plus de 45 % de licenciées. Cette sous-représentation contrarie le principe d’égalité promu par les textes internationaux ratifiés par le Congo et rappelé dans la Charte olympique actuelle révisée.

La commission électorale avait pourtant exigé que chaque liste candidate respecte un quota d’au moins 30 % de femmes, mesure saluée par plusieurs capitaines de clubs. Le retrait tardif de la liste Nzikou, qui comprenait quatre anciennes internationales, relance le risque d’un bureau essentiellement masculin demain.

Pour Justine Mokolo, ex-pivot des Diables Rouges, « la gouvernance sportive doit refléter la mixité du terrain ; sans voix féminine, les priorités médicales, la maternité ou la sécurité lors des déplacements restent marginalisées ». Son interview accordée à notre rédaction confirme l’impatience des joueuses d’être écoutées pleinement.

Le ministère des Sports a, de son côté, rappelé son soutien à une gouvernance inclusive, estimant que « la présence des femmes au sommet favorise le développement harmonieux de la discipline » tout en réaffirmant que le processus électoral relève de l’autonomie reconnue aux fédérations sportives nationales.

Le rôle de la Chambre de conciliation et d’arbitrage

La Chambre de conciliation et d’arbitrage du sport congolais, inspirée du Tribunal arbitral du sport de Lausanne, intervient lorsque les recours internes sont épuisés. Elle privilégie la célérité et l’équité, garantissant que les décisions restent compatibles avec le calendrier international des compétitions africaines de handball continental.

Dans l’affaire actuelle, le juge dispose de la faculté d’ordonner des mesures conservatoires, allant de la suspension partielle à l’annulation pure et simple du scrutin, si l’urgence et l’apparence de droit sont établies, comme le rappelle le professeur de droit sportif Léon Moutou à Brazzaville.

Pour l’avocat requérant, la mise en place de la commission électorale le 14 août 2025 contreviendrait à une sentence précédente datée du 13 octobre 2024, laquelle exigeait une consultation plus large des clubs et la publication intégrale du registre des électeurs ainsi que des critères.

Du côté du bureau sortant, on soutient que toutes les obligations statutaires ont été respectées et que la demande de suspension viserait d’abord à retarder un renouvellement jugé indispensable pour préparer les éliminatoires africains de 2026 et mobiliser de nouveaux financements auprès de partenaires privés.

Réactions des actrices du handball congolais

À Makélékélé, les entraînements du club féminin Étoile de l’Avenir se sont toutefois déroulés dans une atmosphère particulière, les joueuses alternant exercices physiques et discussions animées sur l’issue du contentieux, témoigne l’entraîneure principale Clarisse Bongo, ancienne internationale reconvertie dans la formation des jeunes gardiennes talentueuses.

« Nous souhaitons seulement que les règles soient claires et appliquées pour tout le monde, car notre futur en dépend », explique la capitaine Mireille Ngantsia, rappelant qu’un calendrier instable complique la recherche de sponsors déjà fragilisés par le contexte économique régional sur les marchés locaux émergents.

L’association Femmes et Sport, qui conduit depuis 2020 un programme de mentorat pour les jeunes arbitres, considère pour sa part que la transparence électorale est la première étape d’un environnement sans violences sexistes. La présidente Huguette Massamba plaide pour « un protocole d’écoute des plaintes ».

L’Observatoire partage cette position et rappelle que les fédérations agissant de manière exemplaire sur le plan de la gouvernance enregistrent aussi les plus faibles taux de harcèlement, selon les conclusions de son rapport 2023 couvrant sept disciplines, dont le handball figure au deuxième rang féminin.

Perspectives pour une gouvernance inclusive

Quelles que soient les prochaines décisions de la Chambre, le scrutin de la Fecohand demeurera un test grandeur nature pour la réforme du sport congolais : la communauté attend des dirigeants qu’ils conjuguent efficacité administrative, représentativité de genre et dialogue permanent, seuls garants d’une performance durable et partagée future.