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Un réseau vital pour l’émancipation féminine

À Loudima, le ministre de l’Énergie Émile Ouosso a remis symboliquement un conducteur au directeur général d’Eni Congo, lançant la réhabilitation de 500 km de ligne haute tension. Derrière le geste, une ambition : sécuriser l’alimentation électrique des deux principales villes du pays.

Selon le ministère, près d’un tiers de la charge quittant la Centrale électrique du Congo se perdait en route. Les microcoupures fréquentes entravaient la scolarité des enfants, l’activité artisanale et la conservation des denrées, autant de tâches assumées majoritairement par les femmes.

En améliorant la stabilité du courant, l’État espère libérer du temps domestique, favoriser l’entreprenariat féminin et réduire la pénibilité du travail ménager, trois leviers identifiés par l’Observatoire national congolais des violences faites aux femmes pour accroître l’autonomie économique.

Détails techniques d’une modernisation attendue

Le chantier couvre la réhabilitation de six postes stratégiques : Mindouli, Loudima, M’Bondji, Mongo-Nkamba II, Mongo-Nkamba I et Ngoyo. Des compensateurs statiques seront installés à Mindouli et Loudima pour réguler la tension et limiter les fluctuations diurnes.

Un système de surveillance en temps réel complétera le dispositif. Les capteurs placés sur les pylônes signaleront toute faiblesse structurelle, réduisant les délais d’intervention. « Nous travaillons dans le respect strict de l’art », a assuré Andrea Barberi, rappelant l’importance de la qualité pour un réseau datant de 1982.

Les conducteurs usés seront remplacés par des câbles à haute capacité, capables de supporter l’accroissement de la demande nationale estimée à 6 % par an. La marge ainsi créée devrait suffire à alimenter de nouveaux quartiers périurbains en pleine expansion.

Le calendrier opérationnel prévoit une livraison par tronçons pour éviter les coupures prolongées. Les équipes affirment que chaque segment sera testé avant mise sous tension, une méthode saluée par les ingénieurs locaux pour sa prudence et sa robustesse.

Un partenariat public-privé scruté

Fruit d’un accord État-Eni, la Centrale électrique du Congo fournit aujourd’hui plus de 70 % de l’énergie nationale, avec un taux de fiabilité supérieur à 98 %. Eni participe à hauteur de 20 % au capital, tandis que l’État en détient 80 %.

Andrea Barberi insiste : « L’énergie ne doit pas seulement alimenter les industries, elle doit éclairer l’avenir de la jeunesse et consolider les fondements d’une croissance inclusive ». Ce discours trouve un écho favorable parmi les associations de femmes entrepreneures de Brazzaville.

Les observateurs soulignent que ce modèle de codéveloppement renforce les capacités nationales tout en sécurisant les investissements. La Direction générale de l’Énergie rappelle que la maintenance restera assurée par des techniciens congolais formés sur le chantier même.

Impact socio-économique sur les ménages

L’amélioration de la tension devrait réduire la dépendance aux groupes électrogènes, dont le carburant pèse lourd dans le budget familial. À Makélékélé, une commerçante estime que ses dépenses mensuelles pourraient baisser de 15 %, somme qu’elle destinerait à l’éducation de ses filles.

La fiabilité du courant favorisera aussi l’adoption d’équipements économes : réfrigérateurs, pompes à eau et fours électriques. Ces appareils, encore rares en zone rurale, allègent les charges domestiques et contribuent à la santé en offrant une meilleure conservation des aliments.

Les étudiantes interrogées à l’université Marien Ngouabi évoquent des séances de révision perturbées par les coupures. Un réseau stable prolongera la disponibilité des bibliothèques numériques et réduira les inégalités d’accès à l’information scientifique.

Les organisations de microfinance prévoient enfin de lancer des lignes de crédit dédiées aux petites unités de transformation agroalimentaire féminines, qui ne deviennent rentables qu’avec une fourniture électrique continue.

Voix d’expertes et de consommatrices

Pour la sociologue Clarisse Boukoulou, « l’accès fiable à l’électricité est l’un des déterminants majeurs de la participation des femmes au marché du travail formel ». Elle rappelle que la pénurie énergétique oblige souvent à limiter les horaires d’ouverture des ateliers dirigés par des femmes.

Pauline, vendeuse de poisson fumé à Ngoyo, anticipe déjà le changement : « Jusqu’ici je fume toute la nuit pour éviter les coupures du matin. Avec un courant régulier, je produirai davantage et je pourrai me reposer ».

Garantir la durabilité et l’inclusion énergétique

Le ministère annonce la création d’un observatoire de la performance du réseau, où siégeront des représentants de la société civile et des associations féminines, afin de suivre la qualité de service et de remonter les besoins spécifiques des quartiers périphériques.

Cette gouvernance partagée devrait accompagner la montée en charge de la demande, préserver l’équité territoriale et assurer que le courant nouvellement stabilisé devienne un outil d’émancipation, consolidant ainsi les progrès sociaux déjà engagés par le Congo-Brazzaville.