Le message présidentiel et ses enjeux sociaux
Le 15 août, lors du 65e anniversaire de l’indépendance, le président Denis Sassou Nguesso a rappelé que la sécurité régionale demeure une condition sine qua non de la prospérité congolaise.
Ce message, principalement axé sur la préservation de la paix face aux crises internationales, a été reçu avec attention par les organisations défendant les droits des femmes, pour qui la stabilité représente un bouclier contre l’exacerbation des violences basées sur le genre.
Si certains acteurs politiques dénoncent une lecture trop optimiste de la conjoncture, l’Observatoire national congolais des violences faites aux femmes rappelle que l’absence de conflit armé constitue un prérequis vital pour la prévention, la prise en charge et la réparation des survivantes.
En maintenant le débat sur la paix dans l’espace public, le chef de l’État met indirectement en lumière la nécessité de programmes ambitieux contre les agressions domestiques, phénomène qui touche une Congolaise sur trois selon le Centre de recherche en anthropologie sociale.
Stabilité nationale et sécurité des femmes
Les études de l’Union africaine démontrent que les violences sexuelles augmentent de 30 % en moyenne dans les régions exposées aux combats frontaliers.
Au Congo-Brazzaville, la photographie statistique diffère grâce à une couverture sécuritaire relativement maîtrisée, permettant à la société civile de concentrer ses ressources sur la sensibilisation et le soutien psychologique plutôt que sur l’urgence humanitaire.
« Lorsque les routes restent praticables et les écoles ouvertes, il devient plus simple d’atteindre les victimes et de mener des ateliers de prévention », souligne Paule Ngatse, coordinatrice d’un réseau communautaire à Oyo.
Cette dynamique, saluée par plusieurs bailleurs, s’inscrit dans la Stratégie nationale de lutte contre les violences de genre adoptée en 2022, laquelle mise sur la paix durable pour déployer ses centres d’écoute dans les douze départements.
L’économie inclusive, clé de l’autonomisation
Le chef de l’État a insisté sur la nécessité d’accélérer la sortie de crise économique mondiale pour préserver le pouvoir d’achat national.
Pour les associations féminines, la réouverture progressive des pôles industriels – sucre, bois, énergie – offre des opportunités d’emploi qu’il faut rendre accessibles aux femmes à qualification équivalente.
Le programme public « Entreprendre au féminin », doté de trois milliards de francs CFA, a déjà accompagné six cents micro-projets depuis janvier, selon le ministère de la Promotion de la femme.
Dans un contexte mondial marqué par l’incertitude, ces investissements constituent un filet de sécurité économique limitant la dépendance financière, souvent citée comme facteur aggravant des violences intrafamiliales par ONU Femmes.
Initiatives locales contre les violences genrées
La capitale et plusieurs chefs-lieux départementaux voient émerger des plateformes de dénonciation numériques, permettant un signalement anonyme et rapide des agressions.
Développée en partenariat avec la start-up congolaise LobiTech, l’application « Y’aka parler » a reçu mille signalements en six mois, dont 78 % ont été transmis aux autorités judiciaires compétentes.
La Direction générale de la police affirme que ce canal accélère la prise de plainte de 40 % en moyenne, un gain de temps crucial pour la collecte de preuves.
Parallèlement, les maisons d’accueil soutenues par le gouvernement et appuyées par les ONG fournissent hébergement, appui psychologique et assistance juridique, correspondant aux standards recommandés par la Commission africaine des droits de l’homme.
Perspectives de mobilisation citoyenne
Les campagnes radio diffusées en langues nationales rappellent que la paix n’est pas un acquis figé mais un processus rassembleur, dans lequel chaque communauté, y compris les leaders féminins, doit s’impliquer.
Angela Ondongo, sociologue à l’Université Marien-Ngouabi, insiste : « L’appropriation du discours présidentiel par les jeunes femmes renforce leur sentiment de légitimité à occuper l’espace public et à réclamer la tolérance zéro. »
Dans les prochains mois, l’Observatoire prévoit des forums itinérants couplant projection de films éducatifs et dialogues inter-générationnels, afin de consolider la cohésion et de diffuser les numéros verts d’assistance.
La paix prônée au plus haut niveau reste donc, pour les femmes congolaises, un socle d’émancipation économique et sociale dont la consolidation dépendra autant des politiques publiques que de l’engagement quotidien des citoyennes.
La gouvernance participative, levier d’efficacité
Le ministère des Affaires sociales vient d’annoncer la création d’un comité de suivi multipartite où siègeront des représentantes d’associations rurales, des cheffes d’entreprise et des magistrates, afin d’évaluer trimestriellement l’impact des politiques de protection sur le terrain.
Selon le Programme des Nations unies pour le développement, l’inclusion systématique des femmes dans les comités de paix augmente de 20 % la durabilité des accords locaux, un indicateur dont le Congo entend s’inspirer lors de l’élaboration de ses feuilles de route départementales.
« La présence féminine modifie la nature des priorités, en mettant le focus sur les services sociaux et la médiation préventive », constate le politologue Jean-Baptiste Goma, invitant les municipalités à consolider ces pratiques dans leurs budgets participatifs.
Parce que la paix se nourrit de transparence, plusieurs observateurs recommandent de publier, en ligne, des rapports sexospécifiques afin de mesurer l’évolution des plaintes, des poursuites et des condamnations, une démarche susceptible de renforcer la confiance institutionnelle.