Contexte institutionnel de la fermeture des stades
La réhabilitation récente de la Fédération congolaise de football par les instances internationales a ouvert un nouveau chapitre institutionnel. Dans le même temps, plusieurs enceintes sportives nationales demeurent fermées, créant une zone d’incertitude qui interroge acteurs, supporters et observateurs.
Le ministère des Sports, gestionnaire légal des installations, affirme vouloir garantir des conditions optimales avant toute réouverture. De fait, depuis quelques semaines, compétitions officielles et entraînements sont suspendus, tandis que certains stades accueillent ponctuellement des événements culturels, nourrissant interrogations et spéculations.
Les motifs officiels du ministère des Sports
Interrogé par la presse, le cabinet du ministre évoque la nécessité d’audits structurels, la mise aux normes CAF, ainsi que la mise à jour des dispositifs de sécurité incendie et d’évacuation. Des experts internationaux participeraient déjà à ce diagnostic approfondi.
Le souvenir encore vif de tragédies survenues dans des enceintes voisines renforce cet argumentaire sécuritaire. « Nous devons prévenir toute défaillance avant de rouvrir », souligne un conseiller technique, rappelant que la responsabilité juridique de l’État est engagée en cas d’incident.
Réaction de la FECOFOOT et enjeux compétitifs
De son côté, la FECOFOOT plaide pour une reprise rapide des activités, arguant que les sélections ont besoin de rythme et que les clubs supportent déjà des charges logistiques importantes. Un communiqué publié le 22 août 2025 formalise cette demande.
L’annulation successive de la finale de Coupe du Congo et des barrages d’accession en Ligue 1 a engendré des pertes économiques pour vendeurs ambulants, hôteliers et transporteurs. La fédération estime que chaque week-end sans match coûte plusieurs millions de francs CFA.
Les commerçantes installées aux abords des enceintes rapportent une baisse marquée de leurs revenus quotidiens. « Les jours de match, je vends trois glacières de boissons ; depuis la fermeture, à peine une », témoigne Marie-Rose, 28 ans, mère de deux enfants scolarisés.
Impact sociétal sur la jeunesse congolaise
Au-delà du sport, les sociologues de la jeunesse rappellent que le football constitue un vecteur de cohésion nationale. Dans les quartiers périphériques, les entraînements structurés offrent un espace de socialisation, réduisent l’oisiveté et, selon des études de l’Université Marien-Ngouabi, limitent les conduites à risque.
La fermeture temporaire des stades pousse de nombreux jeunes vers des terrains improvisés, souvent dépourvus de soins médicaux immédiats. Les personnels de santé de l’hôpital de Makélékélé signalent une hausse sensible des blessures sportives mineures depuis juillet 2025, principalement des entorses et contusions.
Conséquences spécifiques pour le football féminin
Les clubs féminins, dont les budgets restent limités, subissent de plein fouet la situation. « Nous devions disputer trois rencontres de championnat avant septembre ; tout est reporté », déplore Joëlle Moudoula, entraîneuse de l’AS Epah-Ngamba, championne sortante.
Faute de terrain homologué, les séances se déroulent désormais sur un espace municipal partiellement sablonneux. Les préparateurs physiques redoutent une baisse de niveau qui pourrait compromettre la compétitivité des Diables Rouges dames aux prochaines éliminatoires de la CAN féminine.
Plus largement, la suspension des compétitions retarde les campagnes de sensibilisation que plusieurs ONG lient aux matches féminins, notamment la prévention des mariages précoces et la promotion des droits reproductifs. Le sport sert ici de levier d’acculturation positive pour les jeunes filles.
Analyses d’experts et pistes de médiation
Pour l’analyste politique Aimé Moutsinga, la situation reflète « un chevauchement de compétences entre administration sportive et gouvernance fédérale ». Il recommande la mise en place d’un protocole d’usage clair, calqué sur les modèles nigérian et rwandais ayant réduit les litiges similaires.
Du côté des juristes, on plaide pour un contrat-programme fixant obligations, calendrier des travaux et mécanismes de suivi. « Ce type d’instrument favorise la transparence sans déposséder l’État de ses prérogatives », estime la professeure de droit public Clarisse Kouadila.
La Confédération africaine de football se dit disposée à fournir une assistance technique pour accélérer la certification des enceintes, à condition que les parties signent une feuille de route commune. Un premier atelier virtuel est annoncé pour la mi-septembre 2025.
Quels scénarios pour la reprise des activités?
Plusieurs sources évoquent déjà un calendrier révisé prévoyant la réouverture graduelle d’Alphonse-Massamba-Débat et de la Concorde dès novembre, après validation des rapports d’expertise. Les clubs seraient informés quatre semaines avant la reprise afin d’ajuster préparation physique et billetterie.
Les techniciens envisagent également des alternatives provisoires, comme la relocalisation de certaines affiches à Owando ou Impfondo, dont les infrastructures ont été rénovées pour les Jeux nationaux de 2023. Une telle option permettrait au calendrier de ne pas accumuler un trop grand retard.
Au Parlement, des députés envisagent d’intégrer un volet spécifique à la loi de finances rectificative pour accélérer le financement des travaux. L’objectif déclaré est de sécuriser les rencontres qualificatives au Mondial 2026, considérées comme une vitrine diplomatique pour le pays.
Dans l’intervalle, joueurs, entraîneurs et supporteurs demeurent unis dans leur attente. Tous soulignent qu’une solution concertée préservera non seulement l’élan du football masculin, mais aussi l’essor prometteur du football féminin, catalyseur d’inclusion et d’égalité que valorise la feuille de route nationale.