Une célébration portée par le message de paix
Sur le boulevard Général Alfred Raoul rénové, la 65e fête de l’indépendance a offert, le 15 août 2025, un spectacle d’unité nationale rare, dominé par l’idée que la paix demeure le ressort premier du développement congolais.
Le président Denis Sassou-Nguesso, accompagné de la première dame Antoinette, a présidé la cérémonie, saluant une foule compacte et bigarrée dont la ferveur illustrait l’adhésion populaire à l’appel officiel « Mobilisés dans la paix, ensemble, poursuivons la marche vers le développement ».
La dimension genre au cœur du protocole
Au-delà des fastes militaires, la journée a mis en lumière la contribution montante des femmes dans la défense, la sécurité civile et la sphère associative, confirmant des avancées que les organisations féminines considèrent comme des leviers indispensables à l’atteinte des Objectifs de développement durable.
Selon la sociologue Irène Senga, « l’iconographie des troupes féminines crée un horizon d’identification pour les filles, tout en normalisant l’idée que le patriotisme est indissociable de l’égalité de genre ».
Plusieurs détachements mixtes, issus de l’École militaire préparatoire Générale Leclerc ou de la Garde républicaine, comptaient près de trente pour cent de femmes, indicateur chiffré rarement atteint dans les parades précédentes, souligne la Direction générale des ressources humaines du ministère de la Défense.
L’engagement citoyen des Congolaises
Dès l’aube, des collectifs de marchandes, d’agricultrices et de lycéennes, venus des douze départements, ont pris place derrière les barrières, drapeaux à la main, convaincues que leur visibilité dans l’espace public représente une reconnaissance symbolique longtemps attendue.
Le clou civil du défilé a été l’apparition d’un bloc dédié aux femmes leaders des confessions religieuses, dont la fanfare kimbanguiste, véritable métissage sonore, a rappelé la contribution historique des mouvements spirituels à la cohésion nationale.
Pour Marie-Claire Moussokio, présidente du Réseau des femmes artisans de paix, « cette visibilité n’est pas folklorique ; elle confirme que la société civile féminine est devenue partenaire stratégique de l’État pour prévenir les conflits et consolider la résilience communautaire ».
La coopération internationale saluée
La participation d’un détachement de la fanfare des forces aériennes des États-Unis a été perçue comme un signal diplomatique fort, matérialisant la coopération sécuritaire et la circulation des savoir-faire musicaux et logistiques.
Dans les tribunes, on a également noté la présence de femmes diplomates, dont l’ambassadrice d’Allemagne, signataire récemment d’un accord de financement orienté vers l’entrepreneuriat féminin dans le domaine des énergies renouvelables.
Le ministère des Affaires étrangères insiste sur le fait que ces présences illustrent la diplomatie de paix prônée par le Congo, où la voix des femmes est de plus en plus mobilisée pour renforcer le soft power national.
Les décorations, symbole d’exemplarité
Douze personnalités ont été décorées par le chef de l’État dans divers ordres du mérite, parmi lesquelles trois femmes officiers, distinguées pour leur participation aux opérations de maintien de la paix en Centrafrique et pour leur engagement dans la formation des nouvelles recrues.
La capitaine Rose Mbemba, première femme pilote d’hélicoptère de combat, a reçu la médaille d’officier de l’Ordre du Mérite congolais et a déclaré que « cette distinction appartient à toutes les jeunes filles qui rêvent d’un uniforme ».
Pour les analystes, ces gestes symboliques valent plaidoyer, car ils alimentent un récit national où l’excellence féminine sert de moteur d’adhésion collective aux réformes économiques et sociales en cours.
Perspectives pour un développement inclusif
Au-delà de la ferveur patriotique, la célébration a rappelé le lien structurel entre paix durable et développement inclusif, deux piliers du Plan national de développement 2022-2026 qui réserve une place centrale à l’autonomisation économique des femmes.
Le ministère de la Promotion de la femme projette, à court terme, la création de guichets régionaux pour le financement des initiatives féminines, stratégie jugée compatible avec l’esprit d’unité mis en avant durant le défilé.
Des organisations comme la Plate-forme des femmes pour le climat insistent déjà pour que les investissements annoncés privilégient des secteurs à forte valeur ajoutée, tels que l’agro-transformation et les énergies vertes, capables de créer des emplois décents en zone rurale.
En quittant la tribune à 13 h 45, le président Sassou-Nguesso a salué la discipline des troupes et la mobilisation populaire, soulignant que « la marche vers le progrès sera d’autant plus rapide qu’elle comptera la contribution déterminée des femmes du Congo ».
Ce 65e anniversaire, riche en symboles, aura ainsi cristallisé l’idée que la paix n’est durable que si elle se double d’une justice sociale où chaque Congolaise peut trouver sa place et participer à l’édification d’un avenir partagé.
Les prochains mois diront comment les recommandations issues du forum national des femmes, tenu en juillet, seront traduites en actions. Mais la symbolique de cette fête nationale offre déjà un capital de confiance dont pourront se nourrir programmes étatiques et initiatives locales.