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Contexte légal

La publication de l’arrêté du 4 mars, rappelée le 12 juillet par le préfet directeur général de l’Administration du territoire, Bonsang Oko Letchaud, intervient dans un calendrier politique chargé et rappelle aux formations non reconnues que la conformité juridique reste la clef d’un jeu démocratique apaisé.

Devant une centaine de responsables de partis, l’autorité administrative a insisté sur l’application de la loi n°20-2017 relative à la création, l’existence et au financement des organisations politiques, soulignant que le retard de six mois accordé pour déposer les dossiers a désormais expiré sans rétorsion définitive.

Un arrêté qui interroge

L’arrêté ministériel, dépourvu de sanctions punitives, précise néanmoins que les partis non régularisés ne sont plus habilités à solliciter l’appui logistique de l’État, ni à présenter des candidats lors des prochaines consultations, tout en conservant leur existence civile et la possibilité de tenir des réunions internes.

Pour Justine Ngonda, juriste spécialiste de la vie associative, « le texte opère un rappel au cadre légal sans porter atteinte au pluralisme, mais il oblige chaque entité à clarifier sa gouvernance, ses comptes et son ancrage territorial », un avis partagé par plusieurs observateurs politiques de Brazzaville.

Réactions des partis non reconnus

Sur le terrain, le ressenti oscille entre incompréhension et prudence. Maurice Kinoko, président du Mouvement pour la démocratie et le changement, dit « craindre une démobilisation aux portes de la présidentielle de 2026 », arguant que son parti figurait sur la liste officielle précédente mais n’apparaît plus aujourd’hui.

D’autres responsables estiment qu’il s’agit d’« une tricherie intellectuelle », expression employée par plusieurs intervenants durant la réunion, pour signifier le décalage entre la non-suspension annoncée et l’impossibilité, de facto, de concourir aux scrutins sans récépissé actualisé délivré par l’Administration du territoire.

Rôle de l’administration

Soulignant la neutralité institutionnelle, Bonsang Oko Letchaud assure qu’une « cellule technique » traite déjà les dossiers reçus et que toute formation apportant les pièces requises, notamment bilan financier certifié et procès-verbal de congrès, sera réintégrée sur la liste officielle dans des délais jugés raisonnables par le ministère.

Au-delà du débat administratif, la procédure souligne la volonté étatique de consolider la transparence dans l’écosystème partisan, un axe régulièrement mis en avant par le ministère de l’Intérieur pour sécuriser le financement public, renforcer la traçabilité des dons privés et responsabiliser les directions politiques envers leurs adhérents.

Incidences sur la participation citoyenne

L’accès des femmes à la vie politique pourrait aussi pâtir d’une suspension prolongée des récépissés. Plusieurs collectifs féminins rappellent que nombre de partis en instance exercent dans les quartiers périphériques où de jeunes militantes trouvent un premier espace d’expression et d’encadrement, souvent introuvable dans les structures déjà établies.

Le professeur Nadia Mavouenzela, sociologue à l’Université Marien-Ngouabi, estime que « l’obligation de conformité ne doit pas devenir un filtre sociologique exclusif ». Elle plaide pour un accompagnement technique afin de préserver « le pluralisme des parcours, notamment ceux des femmes et des jeunes issus de l’économie informelle ».

Dans les quartiers nord de Brazzaville, où l’Observatoire national congolais des violences faites aux femmes anime régulièrement des ateliers, plusieurs participantes expriment l’espoir que la clarification juridique des partis favorisera une offre politique plus stable, gage d’engagement durable contre les violences basées sur le genre.

Écho dans la rue

Dans les cafés de Poto-Poto, la conversation tourne désormais autour des formulaires CERFA et des statuts, preuve qu’un débat technique peut aussi irriguer la conscience citoyenne au quotidien.

Perspectives et enjeux 2026

À deux ans de l’élection présidentielle, la consolidation du registre officiel des partis constitue un signal administratif majeur. Les observateurs s’accordent pour dire qu’un paysage partisan assaini facilitera la sérénité du scrutin, tout en réduisant les contentieux susceptibles de détourner l’attention des programmes dédiés à l’égalité et au développement.

Le ministre Raymond Zéphirin Mboulou a répété, lors d’un récent entretien télévisé, que « la porte reste ouverte à tous ceux qui respectent la règle », renvoyant ainsi les formations concernées à leur responsabilité d’achever la mise à jour de leurs statuts avant la fin de l’année.

Dans l’intervalle, plusieurs organisations de la société civile, dont le Réseau des jeunes observateurs électoraux, préparent des modules de formation sur la gouvernance interne, afin d’accompagner la production de documents exigés et de prévenir toute marginalisation de groupes minoritaires au sein des structures en processus de régularisation.

Les partenaires internationaux, tels que l’Organisation internationale de la francophonie et le PNUD, suivent attentivement l’évolution du dossier. Ils envisagent d’appuyer, à la demande des autorités, des ateliers de renforcement des capacités portant sur la gestion financière et la sensibilisation au leadership féminin dans les instances partisanes.

En définitive, l’arrêté ministériel du 4 mars s’apparente moins à une sanction qu’à une invitation à la normalisation. Les mois à venir diront si l’équilibre recherché entre exigence légale, équité participative et vitalité démocratique peut se matérialiser avant l’ouverture officielle de la campagne présidentielle de 2026.