Une mobilisation caritative structurée
Dans la capitale économique, plus de cent personnes vulnérables ont reçu un panier alimentaire complet lors d’une cérémonie sobre au centre Polio. Derrière cette action se trouve la Caritas diocésaine, guidée par Mgr Abel Liluala, dont l’engagement humanitaire s’inscrit dans la durée.
L’organisation caritative a décidé d’instaurer une distribution trimestrielle, créant un rendez-vous attendu qui atténue l’incertitude des ménages fragilisés. Le calendrier fixe, annoncé dès juin, facilite l’anticipation budgétaire des familles, souvent contraintes de réduire leur consommation dès la mi-mois.
Le geste s’inscrit dans une tradition sociale congolaise où la solidarité paroissiale complète les mécanismes étatiques. Selon les responsables, la sélection des bénéficiaires repose sur des visites à domicile menées par des comités locaux, garantissant une prise en compte des réalités quotidiennes.
Des femmes en première ligne
Sur le terrain, les coordinatrices remarquent que près des deux tiers des bénéficiaires sont des femmes âgées vivant seules après une vie de travail informel. Ce profil accentue la dimension genre de l’opération, car les retraites inexistantes rendent ces grand-mères dépendantes d’aides ponctuelles.
Eveline Makosso, 68 ans, confie que le sac de riz et le bidon d’huile reçus suffiront à nourrir ses petits-enfants restés à la maison. Son témoignage illustre la gestion féminine des ressources alimentaires, où chaque don devient un capital social renforçant l’entraide intergénérationnelle.
Les sociologues notent que l’insécurité alimentaire touche différemment les genres, les femmes privilégiant la vente de menus produits pour maintenir la scolarité des enfants. Recevoir des vivres libère un maigre revenu qu’elles peuvent réinvestir dans des activités génératrices, limitant le cercle vicieux de la précarité.
Cette dynamique rejoint l’objectif national d’autonomisation féminine inscrit dans la stratégie du ministère de la Promotion de la femme. L’appui de la Caritas, perçu comme complémentaire, renforce la visibilité des efforts publics, tout en respectant la neutralité confessionnelle du service rendu.
Le partenariat public-industriel
Le financement provient d’une coopération entre la Caritas et la Société nationale des pétroles du Congo ainsi que la Fondation SNPC. Pour les observateurs, ce modèle public-industriel traduit la responsabilité sociale croissante des entreprises extractives implantées à Pointe-Noire.
L’abbé Steve Mayala rappelle que la transparence reste centrale : chaque kit est enregistré, une preuve photographique est archivée et un rapport trimestriel transmis aux partenaires. Cette traçabilité consolide la confiance et pourrait inspirer d’autres acteurs économiques volontaires.
Au-delà de la logistique, la collaboration offre aussi un appui technique. Les camions mis à disposition par la SNPC permettent d’atteindre les quartiers périphériques, évitant aux bénéficiaires des déplacements coûteux. Les autorités locales saluent cette complémentarité avec les comités de quartiers.
Conséquences sociologiques d’un repas garanti
Les économistes estiment qu’un panier alimentaire couvre environ 40 % des besoins nutritionnels mensuels d’un ménage de trois personnes. Dans un contexte où l’inflation alimentaire frôle les dix pour cent, cette intervention réduit la vulnérabilité de façon immédiate.
Au niveau communautaire, la distribution régulière a un effet pacificateur. Les files d’attente observées en juin se sont déroulées sans tension, preuve qu’une communication claire sur les quotas et les critères d’éligibilité limite les frustrations souvent sources de conflits de voisinage.
Les paroisses, devenues points relais, voient leur rôle social renforcé. Les comités féminins, déjà actifs dans les caisses de solidarité, profitent du flux de bénéficiaires pour diffuser des messages sur la nutrition infantile, le dépistage de l’hypertension ou la lutte contre les violences domestiques.
Ce croisement d’enjeux humanitaires et sanitaires rejoint les Objectifs de développement durable, notamment l’ODD 2 relatif à la faim zéro et l’ODD 5 sur l’égalité de genre. Les experts y voient un exemple de convergence verticale entre initiatives locales et standards internationaux.
Perspectives et défis
Le prochain rendez-vous est prévu en septembre. Les équipes entendent élargir la cible aux ménages monoparentaux identifiés par les services sociaux municipaux, en s’appuyant sur un travail d’enquête déjà entamé avec l’appui des étudiants de l’Université Marien-Ngouabi.
Néanmoins, la demande excède l’offre. Les responsables cherchent de nouveaux partenaires, notamment dans le secteur agro-alimentaire local, afin de réduire les coûts de transport et de soutenir la production congolaise. Ils évoquent des discussions avancées avec des coopératives de Sibiti.
D’ici là, la Caritas maintient un service d’écoute ouvert chaque jeudi. Cette permanence, peu médiatisée, permet de recenser les besoins qui ne se limitent pas à l’alimentaire. Logement, santé ou orientation juridique figurent sur la liste, preuve que la solidarité reste un chantier global.
Les autorités sanitaires envisagent également d’utiliser les prochaines sessions pour proposer une vaccination antigrippale gratuite aux seniors, complétant ainsi le soutien nutritionnel. Cette articulation entre alimentation et prévention illustre une approche holistique du bien-être, saluée par les organisations internationales partenaires.
Observateurs et bénéficiaires s’accordent pour dire que la périodicité trimestrielle constitue un filet social tangible dans un tissu urbain marqué par la migration interne. La Caritas devient alors un acteur clé de cohésion sociale, renforçant la résilience collective de Pointe-Noire.