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Contexte et enjeux

Lorsque les engins ont rugi à Mpiem, le 8 août 2025, bien des femmes des districts du Pool ont vu se dessiner un futur plus mobile. L’aménagement de la route Mpiem-Kindamba, long de 86 km, n’est pas seulement un acte technique mais social.

Un chantier stratégique pour le Pool

En présence du préfet Jules Moukala Tchoumou et de la députée Adélaïde Moungani, le ministre Juste Désiré Mondelé a officiellement lancé les travaux. L’enthousiasme populaire, chants et sifflets à l’appui, traduisait l’attente accumulée depuis les dernières saisons des pluies.

Doté d’une enveloppe globale de 1,7 milliard FCFA, le projet s’étalera sur six mois. SIPAM interviendra sur l’emprise, l’assainissement et la latérite, tandis qu’Universelle Atlantique BTP réalisera dix-neuf dalots, dont un double de 9 mètres destiné à remplacer un pont fragilisé.

Mobilité et inclusion économique des femmes

Dans cette partie du Pool, 72 % des ménages agricoles sont dirigés par des femmes, selon les données 2024 de la Direction départementale de l’agriculture. L’état de la piste freinait l’acheminement du manioc et des légumes vers Mindouli et Brazzaville, réduisant les revenus féminins.

Les sociologues soulignent que la réduction des coûts de transport de 40 % attendue favorisera l’autonomisation. « Le temps gagné se transformera en heures d’apprentissage ou d’entrepreneuriat », explique la chercheuse Elise Mbossa, auteure d’une enquête sur la logistique rurale féminine dans le Pool.

La sécurité routière, enjeu de protection

La portion Mpiem-Kindamba est aussi un corridor sanitaire. Les femmes enceintes mettaient jusque-là plus de trois heures pour rejoindre le centre de santé de Kindamba. La nouvelle plateforme réduira ce délai à une heure, facteur déterminant pour prévenir complications et mortalité maternelle.

Sur le plan sécuritaire, le renforcement de la chaussée et l’éclairage prévu aux abords des zones d’habitation limitent l’exposition aux agressions crépusculaires. L’Observatoire national congolais des violences faites aux femmes recense 18 % d’incidents liés à des trajets nocturnes non sécurisés sur les pistes rurales.

Paroles de terrain

« Je transportais mes régimes de banane sur la tête et j’arrivais au marché exténuée », raconte Mama Clarisse, cultivatrice de Kimba. « Avec la route, je pourrai louer un tricycle et faire deux voyages par jour ». Son témoignage illustre l’espoir partagé.

Pour Grâce Ngakala, étudiante à Mayama, la réduction du temps de trajet signifie aussi plus de sécurité : « Les bus scolaires évitaient la zone en saison pluvieuse. Je ne manquerai plus les cours à cause de la boue », se réjouit-elle.

Approche genre dans les politiques publiques

S’exprimant devant la presse, le ministre Mondelé a rappelé que la feuille de route gouvernementale prévoit l’intégration systématique du genre dans les infrastructures. « Chaque kilomètre aménagé doit améliorer la vie des mères et des filles », a-t-il affirmé, saluant la collaboration avec les organisations féminines.

Le Plan national de développement 2022-2026 identifie le désenclavement rural comme catalyseur d’égalité. La Banque mondiale estime qu’un accès routier fiable accroît de 10 % la probabilité de scolarisation des adolescentes. Ces projections confortent la pertinence de l’intervention sur Mpiem-Kindamba.

Impact sur la lutte contre les violences

Un chemin praticable facilite l’arrivée rapide des forces de sécurité et des services sociaux dans les localités isolées, élément clé pour prévenir violences domestiques ou sexuelles. Les équipes mixtes gendarmerie-affaires sociales pourront intervenir sans craindre l’engloutissement des véhicules dans les bourbiers.

L’accès allégé aux centres d’écoute de Kindamba et Vinza devrait augmenter le dépôt de plaintes, d’après la juriste Joséphine Malonga. « Le premier obstacle à la dénonciation, c’est la route trop chère », observe-t-elle. L’aménagement devient donc un outil de justice.

Un modèle de coopération public-privé responsable

Les entreprises attributaires ont signé une clause sociale prévoyant 30 % de main-d’œuvre féminine dans la cantine, la signalisation et les pépinières de latérite. Cette disposition, saluée par la Chambre de commerce du Pool, ouvre des opportunités d’emploi à des jeunes souvent cantonnées à l’informel.

Par ailleurs, un mécanisme de retour d’expérience permettra à des associations de veuves de suivre le respect des salaires et l’absence de harcèlement sur les chantiers. Une première dans un marché public rural, soulignent les observateurs.

Étapes clés et suivi participatif

Le calendrier fixe le décapage pour septembre, l’achèvement des remblais en novembre, puis la pose des dalots en janvier. Un comité citoyen, comprenant quatre représentantes de collectifs féminins, tiendra des réunions mensuelles pour vérifier l’avancée et alerter en cas de dérive.

Au-delà du goudron, c’est la confiance qui se construit. Le directeur général de l’entretien routier l’assure : « Nous publierons des rapports trimestriels accessibles au public ». Cette transparence est attendue par les associations qui pourront argumenter sur des données vérifiables.

Vers une route porteuse d’avenir

Lorsque la dernière couche de latérite sera compactée, la route Mpiem-Kindamba symbolisera une connexion nouvelle entre développement et égalité. Les femmes du Pool pourront circuler, commercer et apprendre dans de meilleures conditions, consolidant ainsi la dynamique inclusive encouragée par les autorités.

Les indicateurs seront directs : volume de trafic, fréquentation des marchés, taux de consultation prénatale. Si ces chiffres progressent, le chantier montrera qu’une infrastructure bien pensée peut devenir un levier de réduction des inégalités sans heurts budgétaires majeurs.

Dans un an, l’Observatoire publiera un rapport d’impact genré pour mesurer les retombées réelles.