Un écosystème universitaire-média en mutation
La signature, le 22 août 2025 à Brazzaville, d’un accord à durée indéterminée entre le Groupe national de presse La Nouvelle République et l’Institut supérieur Polytechnique-Université témoigne d’une transformation profonde des relations entre université et industrie médiatique au Congo-Brazzaville.
Les clauses clés du partenariat ISP-U – La Nouvelle République
L’accord, paraphé par Anasth Wilfrid Mbossa et Eric Makaya Goma, formalise des stages non rémunérés pour les étudiants finalistes et des formations gratuites pour quatre agents de presse chaque année, établissant une passerelle concrète entre savoir académique et exigences professionnelles.
Pour l’ISP-U, l’ouverture bimensuelle des rédactions offre un débouché essentiel aux diplômés, tandis que le groupe de presse y gagne un dispositif de montée en compétences interne, sans incidence financière, dans un contexte de diversification numérique constant du secteur médiatique.
Les deux institutions ont également instauré un suivi conjoint des stagiaires et des agents en formation continue afin de garantir l’adéquation des contenus pédagogiques aux réalités de terrain et de mesurer, de façon méthodique, les retombées sur la qualité éditoriale.
Insertion professionnelle : un enjeu pour la jeunesse congolaise
Selon les dernières enquêtes du ministère de l’Enseignement supérieur, près de six jeunes sur dix peinent à décrocher un premier poste dans les douze mois suivant l’obtention du diplôme, un indicateur qui souligne l’urgence de dispositifs d’insertion efficaces.
Le partenariat présenté comme un « levier stratégique » par Anasth Wilfrid Mbossa vient donc répondre à une attente sociale forte : renforcer la faculté d’employabilité des jeunes, tout en préservant les standards d’éthique et de rigueur nécessaires à la réputation des médias congolais.
Pour Eric Makaya Goma, la dimension d’accompagnement pédagogique s’ajoute à la valeur du premier contact avec le terrain ; il la qualifie de « sas de professionnalisation » permettant aux étudiants de tester leurs acquis avant même la cérémonie de remise des diplômes.
Renforcement de la compétence féminine dans la presse
Dans les rédactions congolaises, les femmes représentent à peine un tiers des effectifs, un chiffre qui chute encore lorsqu’on observe les postes décisionnels. L’accord ouvre un espace déterminant pour inverser doucement cette tendance structurelle.
La Nouvelle République a indiqué vouloir porter une attention particulière aux candidatures féminines lors de la sélection bimensuelle, estimant que la diversité en salle de rédaction améliore la couverture des sujets liés aux droits, à la santé et à la participation citoyenne des Congolaises.
L’ISP-U, de son côté, promet d’intégrer dans ses modules de formation continue des thématiques sur la prévention des violences basées sur le genre et la représentation équitable des femmes dans les contenus médiatiques, alignant ainsi sa pédagogie sur les recommandations internationales.
Témoignages et analyses d’experts
Pour la sociologue Clémence Ikoué, ce type d’accord illustre « la confiance mutuelle entre secteurs clé de la connaissance et de l’information », condition, selon elle, de la consolidation du capital humain et de la cohésion sociale au niveau national.
Le politologue Patrice Ngoma rappelle toutefois que la réussite dépendra du maintien d’un cadre de gouvernance transparent : « L’évaluation régulière, couplée à la publication des résultats, crédibilisera le dispositif et rassurera les futurs partenaires », prévient-il.
Le ministère de la Communication suit le projet avec intérêt, y voyant un exemple reproductible dans d’autres médias publics ou privés. Plusieurs directeurs de chaînes locales auraient déjà sollicité des informations pour envisager des protocoles similaires avec d’autres établissements supérieurs.
Sur le plan budgétaire, l’accord repose sur la gratuité réciproque et l’optimisation des ressources existantes ; un modèle fréquemment encouragé dans les discours officiels pour contenir la dépense publique tout en favorisant l’innovation au sein de l’administration.
Perspectives d’évolution et suivi de la convention
Les partenaires ont mis sur pied un comité mixte composé de deux représentants par institution, chargé de définir les indicateurs de performance, de planifier les rotations de stagiaires et de soumettre un rapport semestriel à la direction générale des deux entités.
Un système de mentorat interne a également été annoncé : chaque étudiant sera jumelé à un journaliste confirmé, tandis qu’un enseignant-chercheur suivra les progrès des agents en formation, favorisant une boucle vertueuse entre production, réflexivité et mise à jour des compétences.
La coordination prévoit l’utilisation d’outils numériques partagés pour archiver les rapports de stage, collecter les feedbacks et analyser les données de satisfaction. Cette traçabilité vise à sécuriser le dispositif et à générer des recommandations adaptées aux évolutions du paysage médiatique congolais.
Une dynamique durable au service du développement
À moyen terme, les deux structures envisagent d’élargir la convention à la production de recherches appliquées sur l’impact social des médias et à l’organisation de conférences co-certifiées, renforçant la diffusion du savoir et l’ancrage scientifique du journalisme local.
Cette orientation vers la recherche rejoint les priorités nationales de valorisation de la science et de la technologie, notamment les objectifs du Plan national de développement qui placent le capital humain au cœur de la compétitivité économique et de la résilience sociale.
En somme, l’alliance ISP-U / La Nouvelle République témoigne d’une volonté convergente d’investir dans la jeunesse, de promouvoir la représentation féminine et de consolider un journalisme tourné vers l’intérêt général, en parfaite cohérence avec les ambitions de modernisation du pays.