Une dynamique nationale pour l’emploi des jeunes
Sous l’auvent lumineux du ministère de la Jeunesse, la remise des attestations Stagi, tenue le 22 août, a résonné comme un signal fort pour l’insertion professionnelle. Cent quinze jeunes, dont près de la moitié sont des femmes diplômées, ont déjà testé cette passerelle.
Cette cérémonie symbolique s’est doublée de deux annonces: la signature d’un engagement entre le Fonea et Eni Congo pour placer trente nouveaux stagiaires, et le lancement du comité de pilotage du programme YouthConnekt Congo, financé par le PNUD et plusieurs agences partenaires.
Derrière les discours convenus, ces dispositifs illustrent un basculement: l’État privilégie désormais l’accompagnement ciblé, la formation entrepreneuriale et l’expérience en entreprise pour lutter contre le chômage juvénile, évalué à plus de 20 % par le Centre national de la statistique.
Le partenariat public-privé, moteur de compétences
Le directeur général d’Eni Congo, Andrea Barberi, rappelle une conviction simple: « Investir dans le capital humain, c’est investir dans l’avenir du Congo ». Son entreprise finance la rémunération, l’assurance et l’encadrement quotidien des stagiaires affectés sur ses sites pétroliers et gaziers.
En retour, le Fonea supervise les conventions, assure la sélection transparente des candidats et évalue l’apport pédagogique de chaque service. Ce partage des responsabilités limite les coûts publics tout en sécurisant les entreprises, satisfaites de tester de jeunes talents avant un éventuel recrutement.
Le PNUD accompagne cette chaîne vertueuse via des sessions de mentorat, d’une durée de six mois, axées sur la planification de carrière, la maîtrise numérique et la culture du résultat. Quatre cent soixante-sept jeunes ont déjà bénéficié de cet accompagnement, avec un taux de satisfaction déclaré de 92 %.
L’égalité de genre, enjeu transversal
Si la proportion de bénéficiaires féminines progresse, elle reste en deçà de la parité. Selon le Fonea, 46 % des candidats retenus en 2022 étaient des femmes, mais seulement 38 % ont rejoint des stages techniques, souvent considérés comme bastions masculins.
Pour Isabelle Bantsimba, sociologue spécialisée dans la jeunesse, « l’enjeu n’est plus le nombre, mais la qualité des affectations. Les jeunes femmes ont besoin d’une mise en confiance et d’un réseau professionnel pour s’affirmer dans l’industrie, l’énergie ou le numérique ».
En réponse, le comité de pilotage de YouthConnekt Congo prévoit un indicateur de suivi genre obligatoire. Toute nouvelle convention devra réserver au moins 50 % des places aux femmes ou présenter un plan correctif, afin de réduire les écarts sectoriels d’ici trois ans.
YouthConnekt Congo, un levier continental
Inspiré d’une initiative rwandaise lancée en 2012, YouthConnekt vise à connecter politiques publiques, secteur privé et innovation citoyenne. Le Congo est le dix-neuvième pays africain à adopter ce cadre, perçu comme accélérateur de compétences numériques et de leadership jeune.
Le comité de pilotage réunit cinq ministères, des universités publiques et deux associations de femmes entrepreneures. Ses travaux, ouverts par le ministre Hugues Ngouelondelé, doivent aboutir à un plan opérationnel avant décembre, avec un budget prévisionnel de six milliards de francs CFA pour 2024.
L’objectif est double: accroître la part des jeunes en emploi décent, actuellement estimée à 17 %, et encourager la création de micro-entreprises viables. Le module « Je crée mon entreprise » déjà suivi par 500 stagiaires sera enrichi de formations en gestion digitale et commerce transfrontalier.
Perspectives de la deuxième cohorte
L’appel à candidatures pour la deuxième cohorte a été publié sur la plateforme du Fonea. Les inscriptions entièrement dématérialisées garantissent l’égalité d’accès, même depuis les départements ruraux, grâce aux centres publics connectés mis en place par le ministère des Postes et Télécommunications.
Les lauréats bénéficieront d’un coaching individualisé de quarante heures, axé sur les compétences transversales que réclame le tissu économique congolais: expression professionnelle, bilinguisme, esprit critique et connaissance des chaînes de valeur locales, notamment dans l’agro-industrie et les services numériques en pleine expansion.
Le gouvernement entend capitaliser sur les retombées positives de la première cohorte, où 27 % des stagiaires ont obtenu un contrat à durée déterminée dans les six mois suivant la fin du programme, selon une note interne du ministère de la Fonction publique.
Pour les défenseuses des droits des femmes, il est impératif de maintenir ce taux chez les bénéficiaires féminines, parfois victimes de stéréotypes à l’embauche. Une campagne de sensibilisation contre le harcèlement en milieu professionnel sera pilotée par l’Observatoire national congolais des violences faites aux femmes.
Hugues Ngouelondelé insiste enfin sur la dimension citoyenne: « Chaque stagiaire devra réaliser un service communautaire de vingt heures, qu’il s’agisse d’alphabétisation numérique, de reboisement ou de mentorat scolaire. Nous voulons des jeunes compétents, mais aussi responsables et solidaires ».
Au-delà de la cérémonie, le programme Stagi illustre une stratégie coordonnée, soutenue par l’État et ses partenaires, pour transformer le potentiel démographique en atout économique. L’attention portée à l’égalité de genre pourrait en faire un modèle régional d’inclusion et d’autonomisation.
Les inscriptions restent ouvertes jusqu’au 30 septembre, date à laquelle un nouvel élan collectif sera évalué.